Final Fantasy Crystal Chronicles Remastered Edition

Test

Le 01 septembre 2020 à 21:20 par Bastien 0 commentaire
Final Fantasy Crystal Chronicles Remastered Edition

Tout le monde a droit à une seconde chance. Sorti en 2003 sur GameCube, Final Fantasy Crystal Chronicles n'a jamais vraiment marqué les esprits, la faute à une orientation multijoueur trop ambitieuse et coûteuse pour l'époque. Pourtant, celui qui marquait la réconciliation entre Square et Nintendo après plusieurs années de guerre froide a curieusement connu de nombreux projets annexes ; certains sympathiques, d'autres anecdotiques. Raviver la flamme de l'œuvre originale à l'heure où le jeu en ligne facilite les interactions, pourquoi pas. Encore faut-il s'en donner les moyens.

Final Fantasy Crystal Chronicles Remastered Edition
Final Fantasy Crystal Chronicles Remastered Edition

Caravane pas lasse

Quelques minutes passées dans le monde de Crystal Chronicles suffisent à comprendre pourquoi, dès 2003, Square faisait de cette aventure un épisode à part. C'est d'abord un décor tout à fait nouveau qui est proposé aux aventuriers : un univers pastel enchanteur, naïf et convainquant, des personnages aux traits rondelets soutenus par le coup de crayon de Toshiyuki Itahana, un voyage initiatique paisible et reposant. Loin des scènes théâtrales et explosives qui peuvent faire le succès de la saga principale, FFCC se présente comme une agréable respiration qui, rehaussée en haute définition, propose encore quelques beaux panoramas malgré l'aliasing parfois insistant (sur Nintendo Switch, version ici testée). Les joueurs incarnent des voyageurs qui à bord de leur caravane de fortune partent en quête de myrrhe, une eau prodigieuse récoltée auprès d'arbres tout aussi extraordinaires. Cette divine liqueur, qui permettra une fois collectée de raviver les cristaux protecteurs et de dissiper le miasme mortel qui gagne du terrain, n'est évidemment pas à portée de main. Pour remplir son calice, votre délégation — ou votre héros, si vous jouez seul — devra s'aventurer dans les cavernes les plus dangereuses des environs.

Dans Crystal Chronicles, la carte du monde est découpée en régions, elles-mêmes composées de rares villages et de quelques donjons, tous gardés par un boss qui une fois vaincu donne accès à l'arbre à myrrhe. Très vite, ce qui s'apparente à une longue épopée revêt plutôt des allures de micro-épisodes indépendants : après chaque donjon, les artefacts permettant de gonfler les compétences des personnages sont perdus à l'exception d'un d'entre-eux à choisir judicieusement, tout comme l'ensemble des sorts collectés auprès des ennemis. Cela donne cette désagréable impression de ne jamais vraiment progresser, même si les modèles d'équipements glanés sur le terrain participent au renforcement des héros une fois fabriqués chez le forgeron. Les courtes saynètes aléatoires qui surviennent pendant les déplacements sur la carte et les séquences narrées, désormais doublées mais toujours expéditives, participent à cette impression de jeu bricolé, pas très organique, en décalage complet avec l'ambiance musicale poétique, exotique et très cohérente signée Kumi Tanioka.

Final Fantasy Crystal Chronicles Remastered Edition

Crisse de calice

Ce précieux calice au centre de toutes les attentions est également la pierre angulaire de tous les problèmes de Crystal Chronicles et par conséquent de cette Remastered Edition. La progression dans les donjons doit se faire au rythme du porteur de la relique, car sortir de la bulle de protection qui l'entoure, c'est s'exposer à une mort certaine. En multijoueur, cela condamne l'un des protagonistes à se contenter de porter l'objet pendant que ses copains affrontent les ennemis à l'écran. En solo, c'est un moogle contrôlé par l'IA qui s'en chargera... à son rythme. Avec son pathfinding parfois douteux et sa vitesse de croisière molasse, on se retrouve vite hors champ à vouloir progresser plus vite que la musique et à en payer les frais. Cette pesanteur déteint sur l'ensemble du gameplay qui en 2020 paraît complètement désuet à côté d'autres RPG d'action remasterisés avec plus de panache (Trials of Mana, récemment). L'unique combo de 3 attaques physiques, l'absence de véritable impact et la lenteur d'exécution des sorts magiques rendent les affrontements répétitifs, dénués de tout intérêt. Certes, il s'agit de l'essence même de l'aventure originale parue sur GameCube, mais nous sommes en droit d'attendre d'une « Remastered Edition » un peu plus qu'un portage HD dans lequel le mapping des touches (ou plutôt, de « la » touche multifonction), les temps de chargement lourdingues et les vilaines interfaces ont de quoi faire hurler n'importe quel joueur qui souhaiterait aller au bout de la vingtaine d'heures que requiert la trame principale.

« Partageons nos peines », se diront les plus téméraires, qui contacteront tôt ou tard trois copains ou copines pour en finir avec ces insolites chroniques du cristal. Il y a en effet de quoi être séduit quand Square Enix propose « d'enrôler des camarades dans la caravane de cristal », mais cette petite pirouette marketing se révèle à moitié mensongère quand on constate que seuls les donjons peuvent être parcourus à plusieurs. Conséquence : le joueur qui héberge la partie progresse dans l'aventure, mais pas ses camarades — obligatoirement à distance, via le mode Online. Oubliez donc vos projets d'aventure entre amis comme le permettait Crystal Chronicles sur GameCube à condition d'avoir une armada de Game Boy Advance et de câbles. C'est là toute une promesse qui s'envole, et à ce jour, aucun correctif ne semble à l'étude.

Difficile de se montrer conciliant avec Final Fantasy Crystal Chronicles Remastered Edition qui conjugue erreurs d'ergonomie et système de jeu archaïque sans jamais essayer d'embellir l'expérience autrement qu'en affinant quelques textures et modèles de personnages. L'esprit assez unique du projet a su traverser les âges grâce à la patte de l'illustrateur Toshiyuki Itahana et de la compositrice Kumi Tanioka, mais les stigmates du passé qui n'ont pas été gommés par l'équipe en charge de cette version « moderne » ressurgissent encore plus violemment à une époque où le genre a connu quelques itérations beaucoup plus distinguées.

9
Univers et ambiance musicale envoûtants
Combats de boss amusants à plusieurs
Une version Lite gratuite pour les indécis
Ergonomie affreuse
Scénario fantomatique
Mollesse générale regrettable
Progression inexcusable en multijoueur